Pour beaucoup de commentateurs le coeur de Rimbaud signifie le sexe ce qui serait regrette Michael Riffaterre Comme
si ce mauvais sujet d'Arthur n'avait imaginé d'emploi à l'obscurité
poétique que le sous-entendu obscène et n'avait eu d'autre principe
esthétique, et révolutionnaire, que des plaisanteries de potache
Il
faut pourtant relire Un coeur sous la soutane critique encore vive de
Rimbaud de ces jeunes années d'enfance perdues dans les devoirs.
Il rêvait la prairie amoureuse, où des houles
Lumineuses, parfums sains, pubescences d'or,
Font leur remuement calme et prennent leur essor ! Et comme il savourait surtout les sombres choses,
(les poètes de sept ans)
Dans ce texte Un coeur sous la soutane, les odeurs de cuisines vont devenir odeurs sexuelles :
La
cuisinière noire, avec ses trous où flamboyaient les braises comme des
yeux rouges, laissait échapper, de ses casseroles à minces filets de
fumée, une odeur céleste de soupe aux choux et de haricots; et devant
elle, aspirant avec ton doux nez l'odeur de ces légumes, regardant ton
gros chat avec tes beaux yeux gris, ô Vierge au bol, tu essuyais ton
vase! les bandeaux plats et clairs de tes cheveux se collaient
pudiquement sur ton front jaune comme le soleil; de tes yeux courait un
sillon bleuâtre jusqu'au milieu de ta joue, comme à Santa Teresa! ton
nez, plein de l'odeur des haricots, soulevait ses narines délicates; un
duvet léger, serpentant sur tes lèvres, ne contribuait pas peu à donner
une belle énergie à ton visage; et, à ton menton, brillait un beau signe
brun où frissonnaient de beaux poils follets: tes cheveux étaient
sagement retenus à ton occiput par des épingles; mais une courte mèche
s'en échappait... je cherchai vainement tes seins; tu n'en as pas: tu
dédaignes ces ornements mondains: ton coeur est tes seins!... Quand tu
te retournas pour frapper de ton pied large ton chat doré, je vis tes
omoplates saillant et soulevant ta robe, et je fus percé d'amour, devant
le tortillement gracieux des deux arcs prononcés de tes reins!...
Je ne peux résister à évoquer également la métamorphose du gland du jeune séminariste et de son éjaculation :
Miserere! miserere!
- Dans mon oeil ouvert délicieusement vers le plafond tombe tout à coup
une goutte de saumure, dégouttant d'un jambon planant au-dessus de moi,
et, lorsque, tout rouge de honte, réveillé dans ma passion, je baissai
mon front, je m'aperçus que je n'avais dans ma main gauche, au lieu d'un
chapelet, qu'un biberon brun; - ma mère me l'avait confié l'an passé
pour le donner au petit de la mère chose! - De l'oeil que je tendais au
plafond découla la saumure amère: - mais, de l'oeil qui te regardait, ô
Thimothina, une larme coula, larme d'amour, et larme de douleur!...
- Ne trouves-tu pas qu'on sent un goût? répétait-elle
- Cela sent encore!...
Dans sa retraite de coton
Dort le zéphyr à douce haleine:
Dans son nid de soie et de laine
Dort le zéphyr au gai menton!
Quand le zéphyr lève son aile
Dans sa retraite de coton,
Quand il court où la fleur l'appelle,
Sa douce haleine sent bien bon!
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