jeudi 1 novembre 2018

On est heureux avant d'être heureux

Je suis sensuel. Je n’avais rien conçu, j’avais tout senti. 

A l'origine est l'ignorance : non seulement je n’eus jusqu’à mon adolescence aucune idée distincte de l’union des sexes, mais jamais cette idée confuse ne s’offrit à moi que sous une image odieuse et dégoûtante. 
Ainsi sa rencontre avec l'effroyable maure Chevalier de la manchetteje vis partir vers la cheminée et tomber à terre je ne sais quoi de gluant et de blanchâtre qui me fit soulever le cœur. 

J’appris ce dangereux supplément qui trompe la nature, et sauve aux jeunes gens de mon humeur beaucoup de désordres aux dépens de leur santé, de leur vigueur, et quelquefois de leur vie. Ce vice que la honte et la timidité trouvent si commode, a de plus un grand attrait pour les imaginations vives : c’est de disposer, pour ainsi dire, à leur gré, de tout le sexe, et de faire servir à leurs plaisirs la beauté qui les tente, sans avoir besoin d’obtenir son aveu. (paragraphe repris par Jacques Derrida, de la grammatologie)

La critique de la masturbation n'est pas religieuse mais physiologique. Le plaisir sexuel est perçu comme une force naturellement excessive qu’il faudrait réguler afin de ne pas altérer la santé de l’individu. Voir l'influence de l'ouvrage de Samuel-Auguste Tissot, « De l'onanisme », publié en 1760.

Il rencontre ensuite les hommes notamment son aventure Place Bellecour. Il ne voulait exactement, comme il me l’avait dit, que s’amuser et que je m’amusasse, chacun pour son compte ; et cela lui paraissait si simple, qu’il n’avait même pas supposé qu’il ne me le parût pas comme à lui. Je fus si effrayé de cette impudence que, sans lui répondre, je me levai précipitamment et me mis à fuir à toutes jambes, croyant avoir ce misérable à mes trousses.

Il apprécie le rapport avec les femmes, le plaisir sans amour avec madame de Larnage. Mais il ne rentre pas dans les détails contrairement aux histoires dite effroyables. Cette vie délicieuse dura quatre ou cinq jours, pendant lesquels je m’enivrai des plus douces voluptés. Je les goûtai pures, vives, sans aucun mélange de peines : ce sont les premières et les seules que j’aie ainsi goûtées ; et je puis dire que je dois à madame de Larnage de ne pas mourir sans avoir connu le plaisir. » […] « Je ne l’aimais pas non plus comme j’avais aimé et comme j’aimais madame de Warens ; mais c’était pour cela même que je la possédais cent fois mieux.

Jean-Jacques fut-il gigolo ;elle ne fût pas riche elle-même, elle voulut à notre séparation me forcer de partager sa bourse, qu’elle apportait de Grenoble assez bien garnie, et j’eus beaucoup de peine à m’en défendre.

Cela ne l'empêche pas de désirer la fille de cette dame :Elle avait une fille dont elle m’avait parlé très souvent en mère idolâtre. Cette fille avait quinze ans passés ; elle était vive, charmante et d’un caractère aimable. On m’avait promis que j’en serais caressé : je n’avais pas oublié cette promesse, et j’étais fort curieux d’imaginer comment mademoiselle de Larnage traiterait le bon ami de sa maman.

Dans sa jeunesse il revient toujours à madame de Warens ; Près de maman mon plaisir était toujours troublé par un sentiment de tristesse, par un secret serrement de cœur que je ne surmontais pas sans peine ; au lieu de me féliciter de la posséder, je me reprochais de l’avilir. Son dernier écrit est pour elle (Dixième promenade Les Rêveries du promeneur solitaire)

Le sexe idéal reste celui que l'on projette sans le réaliser c'est celui de l'idylle aux cerises : Que mes lèvres ne sont- elles des cerises ! comme je les leur jetterais ainsi de bon cœur !


On est heureux avant d'être heureux

Les Confessions publié à titre posthume en 1782 et 1789.




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