Les quatre lèvres est un poème de Jacques Chessex, poète et écrivain.
Les illustrations japonaises viennent d'un lien avec le cabinotier qui nous propose ses billets quotidiens depuis tant d'années.
J'ai laissé le mensonger laurier
J'ai aimé les quatre lèvres plus que ses pièges
J'ai tenu aux quatre lèvres
Plus qu'à la renommée aux dix mille bouches
J'ai laissé le laurier aux impatients
Avec zèle j'ai cultivé les quatre lèvres
pour la joie de ma bouche et de mes lèvres
Pour la forme de mes mains et de mes doigts
Avec patience et pratiquement
J'ai cultivé leur hospitalité
J'ai étudié leurs mœurs j'ai choyé
J'ai révéré leur volonté
J'ai cultivé les quatre lèvres
Comme on aime la voix des anges
J'ai aimé leur forme et leur parfum
comme on chante avec les anges
J'ai bu à leur rosée céleste et terrestre
Si les anges annoncent l'autre monde
dans ce monde
J'ai bu à la pluie céleste avec leur eau
J'ai touché l'herbe d'ailleurs
J'ai caressé la rive du ciel à leur peau
Pour leur seule gloire
j'ai laissé la gloire de l'heure
J'ai tenu aux quatre lèvres plus qu'à ces leurres
Leur lait venait de plus loin en elles
que toute leur
Bouche
Leur odeur plus douce en elles que la
Caverne
En elles je mangeais le fruit de l'Arbre
et je ne le mangeais pas
Et ma faim sans répit renaissait
de ce repas
Ma soif s'avivait de se rassasier à leurs appas
En elles je ne mangeais pas le fruit à mesure
que je le mangeais
Je le voulais comme au
Jardin
le sachant fruit plus secret 0 lèvres dans le suc des siècles me fuyant
Et je les chérissais les quatre ensemble
les louant
Dans ma bouche de poète et dans ma bouche aussi
de mourant
Si l'ange en pulpe en peau moirée
Toujours luit de ses seules larmes sous son
Ombre
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