Ma chère, en espérant que ce deuxième extrait de Gamiani d'Alfred de Musset arrivera à vous émouvoir.
Si tu nous avais vues toutes deux furibondes, haletantes, tu
aurais compris tout ce que peut l'empire des sens sur deux femmes amoureuses.
Un instant ma tête se trouva prise entre les cuisses de ma lutteuse. Je crus
deviner ses désirs. Inspirée par ma lubricité, je me mis à la ronger dans ses
parties les plus tendres. Mais je répondais mal à ses voeux.
Elle me ramène bien vite sur elle, glisse, s'échappe sous mon
corps et, m'entr'ouvrant subtilement les cuisses, elle m'attaque aussitôt avec
la bouche. Sa langue agile et pointue me pique, me sonde comme un stylet qu'on
pousse et retire rapidement.
Ses dents me prennent et semblent vouloir me déchirer. J'en vins
à m'agiter comme une perdue. Je repoussais la tête de la Supérieure, je la
tirais par les cheveux. Alors elle lâchait prise: elle me touchait doucement,
m'injectait sa salive, me léchait avec lenteur, ou me mordillait le poil et la
chair avec une raffinerie si délicate, si sensuelle à la fois que ce seul
souvenir me fait suinter de plaisir. Oh! quelles délices m'enivraient! Quelle rage
me possédait! Je hurlais sans mesure; je m’abattais abîmée, ou je m'élevais
égarée, et toujours la pointe rapide, aiguë m'atteignait, me perçait avec raideur.
Deux lèvres minces et fermes prenaient mon clitoris, le pinçait, le
pressaient à me détacher l'âme.
Non Fanny, il est impossible de sentir, de jouir de la sorte, ce
n'est qu'une fois en sa vie. Quelle tension dans mes nerfs! Quel battement dans
mes artères! quelle ardeur dans la chair et le sang. Je brûlais, je fondais et
je sentais une bouche avide, insatiable, aspirer jusqu'à l'essence de ma vie.
Illustration Martin Van Maele Un été à la campagne
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